Pérégrinations

À la découverte de la Raoulia (6/55)

La nuit malgré le ronflement cacophonique est agréable pour l’aventurier. Le soleil se lève sur Christchurch, que Flavien dort encore. Son réveil sonne à 7 h 30 tout pile. C’est presque une grasse mat glisse-t-il en ouvrant timidement un œil. Le programme du jour adopte la direction de Porter’s Pass, via Foggy peak. Si le macadam est avalé comme une viennoiserie avec sa boisson chaude, le meilleur reste à venir. Des découvertes florales et surtout des plantes mythiques attendent Flavien, mais la première épreuve est celle de la carte bancaire.

Avec Maxime, avant de prendre le bus, Flavien trouve un café juste à côté de l’auberge. Le duo ainsi abreuvé et réveillé se dirige vers l’arrêt de bus, afin de récupérer leurs voitures respectives basées à l’aéroport. « À l’arrêt, c’est encore un français qui est là, s’amuse l’aventurier du bout du monde. L’Angevin est en PVT (Permis Vacances Travail) et va faire du tennis… il a sa raquette dans le dos. »

L’aventure commence

Après une demi-heure de bus, Flavien arrive à l’aéroport. Le duo se salue en se promettant de se donner des nouvelles durant le voyage. Deux petits kilomètres séparent Flavien de l’agence de location. Sans y penser, la pression monte au fur à mesure qu’il s’en rapproche. « J’ai beau avoir déjà conduit côté gauche, c’est la même appréhension à chaque fois. D’autant que c’est une automatique, une première pour moi », se rassure-t-il. Après avoir versé les 140 dollars néo-zélandais pour deux jours, soit 40 € le nycthémère, et les 2 500 de caution, le voilà tranquillisé.

Flavien, Photo, plante

« C’est du rapide », souffle-t-il. Il se remémore les désagréments que sa carte bancaire lui avait causés en Patagonie. Dix minutes après son arrivée, il roule déjà en direction Porter’s Pass, à une heure de là. Sans musique pour rester concentré, il file à la vitesse de 100 km/h sur les routes normales. « C’est encore plus simple avec la boîte automatique », sourit-il.

Pourquoi Porter’s Pass ? Car, il espère découvrir des espèces mythiques pour lui. « Arrivé à Porter’s Pass, vers 950 m d’altitude, je marche vers Foggy peak. » Ses recherches se révèlent concluantes. « Je trouve Stellaria roughii, Lignocarpa cornulosa, Leptinella atrata et… Raoulia eximia, l’une des 25 espèces à voir dans ma vie. » Si la surprise est de taille, quel plaisir de découvrir ces coussins vieux de plusieurs siècles plus grands que moi, raconte-t-il, presque ému d’une telle rencontre.

(Crédits : Flavien Saboureau)

Des multiples de photos plus tard, il s’enquiert d’une espèce bien particulière : Notothlaspi rosulatum. Ses recherches, réalisées en amont l’emmène proche d’une station de ski… à seulement quelques dizaines de kilomètres. « Je dois emprunter une piste, mais avec les 2 500 dollars néo-zélandais de caution… je sens comme une épée de Damoclès au-dessus de moi. »

Photographiée, telle une star à Cannes

Arrivé à l’endroit repéré, et sans dommage, Flavien s’aperçoit que la dernière partie est fermée. Il est 15 h 30 lorsqu’il entreprend les 4, 5 kilomètres qui le séparent du point de rendez-vous. Cerise sur le gâteau, un dénivelé positif de 400 mètres se greffe. « La marche sur la piste est monotone », raconte Flavien.

Mais dès son apparition, cette morosité disparaît comme par enchantement. Pour être transparent, Raoulia eximia me fait de l’œil depuis de nombreuses années, souffle-t-il. « Je prends une centaine de photos avant de redescendre par un chemin plus escarpé… habituellement emprunté par les VTT de descente », ajoute-t-il.

Une descente enthousiaste dans de magnifiques forêts à Nothofagus cliffortioides : « elles ressemblent à s’y méprendre à celles de Patagonie. Pour moi, fan de phytogéographie, c’est quelque chose de marquant. » De retour à la voiture, après avoir rempli les gourdes au pied d’un ruisseau, il se dirige vers Arthur’s Pass à 45 min de route. « Au loin, dans ma direction, le temps se gâte. Je patiente une demi-heure qu’un pont réouvre, et j’arrive enfin. Je compte passer la nuit dans une espèce de camping du DOC, mais je n’ai pas réservé. »

(Crédits : Flavien Saboureau)

Raoulia, Nouvelle Zélande, fleur

La pluie est là, la réception est fermée. « Je laisse mon nom écrit sur un papier que je glisse dans la boîte aux lettres. Je payerai demain matin les 15 dollars. » Flavien mange à l’abri, en compagnie d’autres personnes. « J’ouvre mon plus grand lyophilisé. Je n’ai pas mangé ce midi ni eu le temps de faire des courses. » Les prévisions météorologiques annoncent plusieurs dizaines de millimètres cette nuit. « Je choisis de passer la nuit sur le siège passager, vu que le sol est déjà trempé. On verra bien ce que peut donner une nuit à dormir dans une Toyota Yaris. » À suivre…

Romuald Pena

Journaliste et curieux de nature, j’aime les mots et ce qu’ils chantent aux oreilles qui les entendent. « La vérité, c’est qu’il n’y a pas de vérité », assurait Pablo Neruda. Ainsi j’apporte des faits, des faits, encore et toujours des faits, car : « Nous ne pouvons être condamnés à pire, à juger les autres, à être des juges. » (Le Testament d’Orphée, de Jean Cocteau)

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