
Au pays du long nuage blanc (5/55)
Les réglages et habitudes ne sont pas encore effectifs chez Flavien. Il faut dire qu’il ne se trouve pas tout à fait en pleine nature, là où il se sent comme chez lui, en symbiose et apaisé. À quelques encablures de fouler la véritable nature, il poursuit son voyage en direction du sud. Ce matin, mon horloge interne n’est toujours pas opérationnelle. Malgré le réveil programmé pour 6 h 30, Flavien ouvre les yeux une heure plus tôt. Sans faire de bruit, il délaisse le lieu, car il se rend compte qu’une personne partage sa chambre.
L’autre backpacker est arrivé cette nuit constate-t-il. « C’est une fille. Mais je n’en saurais pas plus, car je serai parti avant qu’elle ne se réveille. » Ses affaires sont prêtes depuis la veille. Il quitte, à 6 h 45, l’auberge. Trois quarts d’heure et deux kilomètres plus tard, Flavien arrive au terminal du ferry. « Enregistrement effectué, je suis dans la file d’attente », patiente l’aventurier. L’embarquement ne commence qu’à 8 h 25. Une petite heure devant lui à occuper. Il prodigue ce temps à envoyer quelques nouvelles.
En route, Capitaine !
L’ensemble des voyageurs si tôt embarqué, se rue au pont restauration constate le baroudeur. Sans véritablement fuir la foule, Flavien et quelques autres se placent au pont numéro 10, à l’extérieur. Ils profitent de la traversée et du paysage pendant les 3 h 30 de mer à venir. « À peine sorti de la baie, le vent forcit, les premiers puffins sont présents. » Sans connaître les régionaux, Flavien avance le nom de puffin à pieds pâles.

Le vent qui forcit devient très puissant. Les plus courageux s’accrochent aux rambardes pour se maintenir debout. Un albatros, un juvénile qui plus est, passe furtivement devant les billes écarquillées de Flavien. « Quel plaisir de revoir cet oiseau près d’un an plus tard ! »
Des nuées de prions, qui ressemblent à ceux de belcher, suivent le bateau. « Je les photographie sous toutes les coutures pour mettre un nom sur l’espèce. Ils sont connus pour leur difficulté d’identification », explique-t-il, tandis que les premiers reliefs de l’île du sud se dessinent. « Un œil à l’arrière donne une vue d’ensemble sur l’île de nord, où un énorme nuage lenticulaire surplombe l’île, ce serait donc de là que ce pays porte le nom du pays au long nuage blanc ? »
« Nous entrons dans les Malborough sounds, à l’extrême nord de l’île du sud. Beaucoup de gens trouvent ça magnifique, je suis un peu plus mitigé. » (Crédits : Flavien Saboureau)
Quand on a un œil naturaliste, explique-t-il, on se rend compte que les flancs des montagnes, qui tombent à pic dans l’océan, sont complètement modifiés, il n’y a plus rien de naturel… Soit dit en passant, la carte de la région de Marlborough ressemble trait pour trait à l’italienne, mais inversée. Une forme de botte à talon, une Go-go boots.
Chassez le naturel, il revient au galop
« Arrivé à Picton, je ne sais pas à quoi m’attendre… Je suis agréablement surpris. Il faisait beau, chaud. Les rues sont chaleureuses », raconte Flavien. Aux environs du 52 Hight Street, il stoppe. Il y achète un Tarakihi frit pour 10 NZD. « Un régal », s’exprime-t-il après avoir croqué dedans. Le hasard fait bien les choses. En se retournant, le magasin, un supermarket, en face vend des bouteilles de gaz de camping. Dorénavant, l’ensemble de sa liste de matériel est complète, il met les bouchées doubles, dirait-on, car « à 13 h 45 je prends le bus pour Christchurch. »
Une fois dans le bus, un Français repère son accent et l’interpelle. La discussion commence. Ils peuvent faire connaissance, car le trajet dure près de six heures. « Il est lyonnais et responsable de chauffeurs de poids lourds. » N’ayant pas trouvé d’auberge, il réserve la même que Flavien durant le trajet. La route qu’emprunte le bus est variée.
« Les paysages du début font peur à voir, martèle le naturaliste. Des collines entièrement déforestées, colonisées par des graminées introduites. Les suivants, en bord de mer, sont plus naturels. »
Le front de mer, lorsqu’il est rocheux, est le repère de milliers d’otaries, de mouettes et de cormorans qui nichent sur les rochers. Le convoi arrive à Christchurch aux alentours de 19 h 30. Le duo de Français prend la direction de l’auberge, à 800 m de marche. « Arrivé dans la chambre que l’on partage avec deux Asiatiques, j’ai oublié mon petit sac de transport à la descente du bus », s’écrit-il.
(Crédits : Flavien Saboureau)

La chance sourit aux audacieux dit l’adage. « Je le retrouve intact et complet. » Vu l’heure, le duo, s’enquiert d’un lieu pour manger. « On décide d’aller prendre une bière et de manger une pizza. » Si la recherche s’éternise, une fois trouvée, ça vaut le coup glisse Flavien, arborant une moustache colorée de mousse. Le ventre repu, ils s’en retournent à l’auberge. « Je réserve une voiture pour demain. Coïncidence heureuse, Maxime doit aussi récupérer la sienne à l’aéroport demain matin. » Encore une journée de transport pense-t-il avant qu’un bruit sorti de nulle part l’interpelle. « Un des deux Asiatiques a un ronflement cacophonique, j’ai rarement vu ça. » À suivre…
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