Quand la technique vous lâche (4/55)
Depuis le départ de sa nouvelle aventure en terre néo-zélandaise, Flavien n’a pas recouvré son quota de sommeil. Pour autant, une chose qui n’est pas la pluie va le miner. Le naturaliste est avide de photos. Il croque chaque fleur, plante, arbre, arbrisseau… sous toutes les coutures. Mais, alors que se passerait-il si votre carte mémoire ne voulait plus rien savoir ? Première expérience du voyage est-elle le lâcher prise ? Ce qui est sûr est que Flavien doit pallier le désagrément rapidement.
« Après plusieurs nuits ratées, je profite de celle-ci pour faire la grasse mat », dit-il en s’allongeant. Quand il s’éveille, il est 8 h 45. À voir sa mine reposée, la nuit a été agréable. Dans une heure, il doit libérer le lit. Alors direction la douche, car « la prochaine nuit se passera dans le bus. Pas moyen de me laver avant au moins deux jours ». Flavien frais et dispo se rend à la réception. Puis, il laisse ses affaires la journée, pour visiter la ville. Première surprise de la journée, c’est gratuit. En Patagonie il fallait payer un supplément, se remémore-t-il. « Ce n’est étonnamment pas le cas ici, alors que tout est plus cher qu’en Amérique du Sud. »
Voyage à la carte
Flavien voyage léger. Petit sac sur le dos, ciré, appareil photo et une gourde d’eau, le voici parti à l’assaut d’Auckland. Premier objectif, le mont Éden : le plus haut des 48 volcans qui constelle la ville. Les volcans sont disséminés sur le champ volcanique, qui s’étend du lac Pupuke et de l’île Rangitoto au nord jusqu’à Matukutūruru au sud. Puis du mont Albert à l’ouest jusqu’au Pigeon à l’est. « N’ayant pas souhaité prendre de carte SIM, comme précédemment en Patagonie, je me déplace grâce à des cartes hors ligne (Guru maps) », explique-t-il. Il arrive au sommet, à 198 mètres pour être précis, pour se rendre compte que les touristes sont aussi au rendez-vous. « Malgré tout, ça vaut le coup de se mélanger à la foule. La vue est grandiose. La visibilité s’étend à des kilomètres, d’un côté les gratte-ciels d’où je viens et de l’autre les zones pavillonnaires à perte de vue. »

Un bonheur n’arrivant jamais seul, la pluie se présente. Flavien décide de se mettre à l’abri, en prenant la direction du musée de la guerre, à quelques encablures de là. « La pluie redouble d’intensité », constate-t-il. Prévoyant, il teste pour la première fois son poncho de pluie. Deuxième surprise du jour : « Arrivé au musée je découvre que l’entrée n’est pas donnée (32 NZD). Vu la taille du bâtiment, ça doit valoir le coup », se rassure-t-il.
« L’intérieur est très beau », constate-t-il, sans forcément trouver le lien entre les différentes collections. Au premier étage, la culture maorie. Deuxièmement, les volcans et l’histoire naturelle de l’île. Au troisième les guerres dans lesquelles certains les néo-zélandais ont péri.
Quatre heures plus tard, Flavien file en direction du front de mer. La pluie « tropicale » refait son apparition, l’aventurier coupe court son périple pour se mettre à l’abri à l’auberge. (Crédits : Flavien Saboureau)
Pas le temps d’être oisif. « Je profite de la Wi-Fi pour réserver mon auberge du surlendemain et le ferry pour rallier l’île du sud dans deux jours. » La tocante affiche 17 h 45n quand Flavien repart en direction du front de mer, mais cette fois avec sur le dos son sac chargé à bloc. Il doit être à 18 h 45 à la gare routière pour prendre le bus de nuit pour Wellington. Arrivée à bon port « j’en profite pour manger des nuggets avant de prendre la route, puis je prends place dans le bus pour… 11 h 30 de route. »
Un sommeil haché
« Je réussis à m’endormir… mais chaque heure, l’annonce des arrêts au micro me réveille. » Flavien pensait que ce bus ne faisait pas d’arrêt. Difficile de dormir, déjà dans un bus, et surtout avec l’agitation survenant à chaque arrêt… « Il est 6 h du mat. Nous arrivons bientôt à Wellington, à l’extrême sud de l’île du nord. Finalement, le voyage qui ne devait durer que 11 h 30 en durera 12 h 30 », ironise Flavien. À 7 h 30, il se présente à l’auberge de jeunesse située juste à côté de la gare. La « Trek Global Backpackers » est un choix stratégique au demeurant.
« Je choisis celle-ci, car, prenant le bateau tôt demain matin, elle est proche du port, et pas chère. » Affichant le tarif de 13 €, elle rivalise avec les auberges sud-américaines. Elle propose même des chambres privées, des « Female Single Room ». Il laisse son sac à dos pour se promener dans la ville avec mon seul sac de transport, le plus petit. À tout juste 7 h 45, il déambule dans les rues de Windy Welly. Wellington doit son surnom aux fortes rafales de vent qui la balaie.
Perché au sommet
Le regard aguerrit, Flavien scrute la ville. Sympathique, mais avec le port « industriel » situé en pleine ville, le front de mer manque de charme, nous révèle-t-il. « L’ambiance reste cependant meilleure qu’à Auckland à mon avis et de ce que j’ai pu voir. » Comme pour Auckland et le mont Eden, l’aventurier du bout du monde trace vers le mont Victoria. « Il faut quand même monter 200 m de dénivelé. » Mais le jeu en vaut la chandelle, il offre une vue à 360 degrés sur la ville, le port et l’océan.
« Sur ces flancs quelques pseudos reliques de forêts recèlent les premières espèces que je trouve intéressantes. » Cela suffit à Flavien pour dégainer son appareil et photographier ses premières plantes du voyage. À cette heure matinale, peu de courageux. « Je profite seul du panorama ! » Après quelques instants de réflexion, il prend la direction de Zealandia à l’autre bout de la ville. Cinq kilomètres, Flavien découvre ce parc semi-naturel, entouré de barrières. Zealandia Te Māra a Tāne est le premier écosystème urbain entièrement clôturé au monde. Le but est de restaurer la forêt et les écosystèmes d’eau douce d’une vallée de Wellington aussi étroitement que possible à leur état pré-humain, expliquent-ils. (Crédits : Flavien Saboureau)

« C’est le cas du Sphénodon, l’un, si ce n’est le plus ancien, des représentants des reptiles », relate Flavien. Ne subsistant plus que sur quelques îles, cette réserve est la seule à l’accueillir sur le « main-land » explique-t-il. « Sur les conseils d’un guide/biologiste, je ne tarde pas trop à le trouver. » Oui, sauf que peu de temps à l’échelle d’un Flavien représente quand même 25 minutes. Un seul individu se montre, lézardant au soleil. « Le pied ! Cet animal m’a toujours fasciné, ne serait-ce que par son nom des plus préhistoriques. »
Quand la technique vous lâche
Il poursuit ses recherches des oiseaux les plus rares. À 13 h, Flavien prend sa pause repas pour recharger les batteries. Il revient sur ses traces matinales, car « j’espère faire de meilleures photos de ces espèces qui ne se laissent pas photographier facilement. » Il éprouve un réel plaisir quand il réussit une très belle photo du pigeon endémique de Nouvelle-Zélande : le carcophage ou kereru. « Ses couleurs sont incroyables, sa taille impressionnante, il fait facilement deux fois la taille des espèces européennes », décrit Flavien.

Passionné, le temps passe trop vite. « Je double mon intensité de marche si je veux être hors de la réserve avant 17 h. »
Puis, l’impensable se produit ! Sa carte SD ne veut plus rien savoir. L’appareil photo indique un problème de formatage. « Il ne manquait plus que ça, après les 500 photos d’espèces uniques photographiées aujourd’hui. »
« Je ronge mon frein quand de magnifiques espèces se posent devant moi. À l’image de ce martin-pêcheur que je n’ai jamais vu. » Désormais Flavien espère qu’une seule chose : « Vais-je pouvoir récupérer les photos du jour à mon retour ? » Puis, il pense à vois haute. Devrais-je revenir avant la fin de mon voyage ? Mais je devrais payer une autre entrée (26 NZD) et « perdre » une journée. « Bien entendu la carte SD que j’avais de rab était restée dans mon sac à dos à l’auberge », grommelle-t-il.
(Crédits : Flavien Saboureau)
Le temps du lâcher-prise est arrivé durant les quatre kilomètres pour rentrer à l’auberge. Au passage, la visite à la fameuse « cablecar » est vite oubliée. « Avec plus de 20 km dans les pattes aujourd’hui, je rentre à l’auberge », raisonne-t-il. Il réalise le check-in, prend une douche, lave son linge, réserve l’auberge pour demain, 14 décembre, et prend la direction du centre-ville pour tenter de trouver un magasin ouvert. Au menu ce soir, pâtes au pesto. Le baroudeur prépare son repas dans la cuisine de l’auberge. Il est 22 h quand Flavien se couche. « Demain matin, une fois n’est pas coutume, levée matinale pour prendre le ferry qui m’emmènera sur l’île du sud… », s’endort-il sans finir sa phrase. À suivre…
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