dimanche, mars 17, 2024
Le saviez-vous ?

Être une grenouille de bénitier, vous connaissez ?

Si la langue française était une salade, les expressions seraient les croûtons croustillants et savoureux. Aujourd’hui, nous plongeons dans un bol de formules alambiquées. Avec bon jeu de mots, les expressions « une grenouille de bénitier », « tailler une bavette » et « être fleur bleue » possèdent des points communs, ou du moins un lien légèrement capillotracté. Avec-vous la moindre idée de ce lien ? Alors si vous êtes prêtes et prêts à vous régaler avec des mots sur un air de La Rue Kétanou, allons-y !

Le marché hebdomadaire bat son plein samedi matin sur la place St Pol à Nogent-le-Rotrou, non loin de l’Hôtel de Ville. Malgré la touffeur naissante, M Phot et Mme Karéson sont venus. Ils ne manqueraient cette matinée pour rien au monde. D’autant qu’il n’est pas rare de croiser des personnes quelque peu célèbres, mais au combien simple à aborder et débordant de gentillesse. C’est ainsi qu’un voisin de Nogent, habitant à Thiron-Gardais déambule de temps à autre entre les étals des marchands. Mais, c’est aussi pour le plaisir de déguster le fameux chocolat chaud à l’ancienne.

« Tu as vu Jules, Marcel, Albert et Paquito, de vraies grenouilles de bénitier », souffle Sépa Phot.

« Oui, sur la terrasse entrain de siroter leur apéritif, et de conter fleurette à la serveuse », s’amuse Séki Kharéson

« Ils sont presque fleur bleue, s’ils n’étaient pas de mon âge », rit Sépa tout en continuant de lorgner les bettes.

« Pendant que tu y es, prends aussi aubergine, poivrons et des jolies tomates pour une ratatouille. Tu vas bien ? », ajoute-t-elle.

« Oui pourquoi ? Ah, oui ! Comme tu me le dis souvent, je me concentre sur une seule tâche à la fois », répond-il avec un large sourire.

« Vu que nos courses sont faites, prenons un bon chocolat chaud, je pourrais te conter ces fameuses expressions »

Le couple de Berd’huisiens se place à l’abri d’un parasol, car le soleil perce et réchauffe déjà l’atmosphère, non loin du quatuor. Il est vrai que tout part de ces quatre personnes, et qu’ils sont un sujet pour ces trois expressions. Autrefois, au XVIIIe siècle, « tailler » signifiait « parler ». Ainsi, « tailler une bavette » c’est engager une discussion animée. Ce qui nécessite une production d’une quantité certaine de salive ou de bave. C’est pour ça que nos chers mousquetaires ont repris « la p’tite sœur » à l’apéro. Ils se racontent monts et merveilles de leur été quasiment fini, avec cette canicule tardive, rien de tel que de se désaltérer.

Les expressions sont utilisées même sans le savoir, chaque jour. Des pléonasmes en naissent car la langue française est vivante. (Crédits : hoahoa111/Pixabay)

Imaginez qu’en place de la table du troquet, l’action se déroule dans une église, à côté du bénitier. En des temps anciens disaient mes aïeux, les personnes qui fréquentaient assidûment les églises et se rassemblaient à l’entrée avant de se signer autour du bénitier, se nommaient des dévots ou les dévotes. Prenez une largeur d’esprit pour vous déplacer autour d’une mare, un soir d’été. Les grenouilles y coassent joyeusement. D’ailleurs, si vous passez la tondeuse juste à côté de la mare, vous les endenteraient augmenter le volume. Elles ne s’entendent plus échanger des potins. D’ailleurs connaissez-vous l’histoire du « signe de croix » accompli autour du bénitier ? Non ? Alors regardez la vidéo !

Une explication en bonne et due forme d’un geste effectué par les catholiques et orthodoxes. Tout comme le fait de se servir de la main droite, car la gauche est associée à une tache délicate et nécessaire. Oui, lorsque être sur votre cabinet d’aisances avec le fameux papier hygiénique, ou pas selon vos us et coutumes. (Crédits : Frère Paul Adrien/YouTube)

Quant à l’expression « fleur bleue », il faut traverser le Rhin pour rendre visite au XVIIIe à Novalis, de son vrai nom Georg Philipp Friedrich von Hardenberg. C’est à Weißenfels, juste avant Leipzig que l’auteur laisse transparaître cette expression, Die blaue Blume dans la langue de Goethe. « Être fleur bleue » signifie être sentimental, sensible et un tantinet naïf, à l’âge de l’adolescence, mais au tout départ. Ajouté une touche de bleu, qui dans le langage des fleurs ajoute tendresse, romantisme et poésie. Retour au roman inachevé de Novalis intitulé Heni d’Ofterdingen parle d’un poète à la recherche d’un idéal, comme dans un film « Le Dernier Samouraï » de la fleur de cerisier parfaite. « De là à dire que Jules, Marcel, Albert et Paquito sont “fleur bleue”, il ne faut pas pousser », affirme Séki en posant sa tasse de chocolat délicieusement vide.

Elise Dardut

Épicurienne, je reste une jeune femme à l’aise dans son corps et dans sa tête. Je pense par moi-même, j’agis par moi-même, j’entends les conseils et n’écoute que mon intuition. « Le jour où l’homme aura la malice, la finesse et la subtilité de la femme, il sera le roi du monde… mais ce n’est pas pour demain », me chantait mon grand-père. Il m’a appris que « les seuls beaux yeux sont ceux qui vous regardent avec tendresse. » (Coco Chanel) Depuis, je m’évertue, pour qui veut bien entendre et écouter, à distiller des graines ici et là, au gré du vent. Un proverbe indien explique que « si vous enseignez à un homme, vous enseignez à une personne. Si vous enseignez à une femme, vous enseignez à toute la famille » Il est temps d’inverser les rôles et admettre l’équité, non ?

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