
Se geler pour un lever de soleil (24/55)
Déjà un mois, en ce neuf janvier 2025 que Flavien a quitté la quiétude de Lavausseau, la cité des tanneurs, pour un périple néo-zélandais. Un mois de photographies, de vues à couper le souffle, de rencontres inoubliables… bref, un voyage hors du commun. Mais pourtant, loin d’être blasé, il rêve de choses simples. Ainsi, le plaisir de manger, de passer un moment en bonne compagnie, jouer au billard à l’autre bout du monde, jusqu’à un simple lever de soleil. Simple, sûrement mais sur le plus haut sommet de Nouvelle-Zélande, le mont Cook.
« Ce matin, je me met un coup de pied aux fesses pour me lever », raconte-t-il. L’heure sur sa montre indique cinq heures passée de trente minutes. L’heure des derniers songes avant d’émerger logiquement de la couette, bien plus tard. Mais l’aventurier du bout du monde est en quête d’une nouvelle expérience. Il a vécu des couchers de soleil, dont celui sur le mont Cook, hier. Mais un lever de soleil à cette altitude en Nouvelle-Zélande, pas encore.
Le temps est suspendu
« J’ai mis un réveil à deux heures, pour voir les étoiles mais le froid m’en a découragé. » Malgré son sac sarcophage, son nez est tout simplement gelé, ce matin. « Il m’en faut plus pour me décourager. J’enfile deux pantalons, cinq couches en haut, mes gants, mon buff et mon bonnet. Autrement dit tout ce que j’ai. » Cet ensemble est agréable pour attendre à 6 h 06, les premiers rayons de soleil léchant le sommet.

La température à Aoraki, soit mille mètres plus bas est de 5 °C, le 9 janvier 2025. « La température décroît de 0,65°C tous les 100 m quand on s’élève », explique le club alpin français de Lyon-Villeurbanne. Selon le calcul simplifié de température ressentie (Windchill) elle serait au moment du lever de soleil de -6 °C.
« Il faut attendre 6 h 18 tapante, pour qu’il commence à réchauffer la dizaine de personnes qui, comme moi, attendent ce moment depuis plusieurs dizaines de minutes. »
Aucun nuage à l’horizon, quel contraste avec la soirée d’hier… Pour continuer à profiter du moment, je monte jusqu’au Mont Ollivier à 1930 m. « Là haut, je suis tout seul à surplomber la vallée, à admirer les avalanches qui font un bruit fracassant dans ces vallées glaciaires qui m’entourent », commente Flavien tel un lézard au soleil. (Crédits : Flavien Saboureau)
Il est aux alentours de 7 h 30 quand « je retourne auprès de ma tente ». Elle est touchée à son tour par le soleil. « La chaleur est nécessaire pour sécher la pluie d’hier. » Comme un amateur de puzzle, l’aventurier étale toutes ses affaires sur les rochers jouxtant son lieu de villégiature. Durant plus d’une heure, les frusques sèchent avant de pouvoir les ranger dans le sac. Action nécessaire pour éviter que des moisissures s’installent à la longue.
« J’en profite pour faire bouillir l’eau du refuge lors de la redescente. C’est la première randonnées où je ne trouve pas d’eau… En même temps elle est sous forme de neige ou de glace ici. »
À 9 h pétantes, le naturaliste chemine dans les traces de la veille, avec des paysages bien plus admirables assure-t-il.
C’est l’occasion de refaire les photos de plantes avec les rayons de soleil. « Les nuages grimpent, comme rappelés par le soleil… ainsi que les nombreuses personnes que je croise, s’ils savaient ce qu’ils ont loupé. »
De retour à sa voiture de location, il se fige. « Hier, je croyais qu’il y avait du monde, et bien j’avais rien vu. » La route se trouve flanquée d’un ruban de part et d’autre sur près d’un kilomètre, tel un couloir silencieux de métal inerte. (Crédits : Flavien Saboureau)

« C’est dingue tous ces touristes qui se traînent en claquette ou en robe pour faire les petits sentiers alentours. » L’aventurier du bout du monde via le WI-FI du centre des visiteurs, vérifie les prévisions météorologiques pour la suite de son périple.
Le plus grand glacier néo-zélandais
Les prévisions ne sont pas enchanteresses, bien au contraire. « La journée de demain n’est pas dingue, alors je retourne près de la côte. » En cas de temps peu enclin à la balade, l’écriture est idéale. « J’en profite pour acheter quelques cartes postales. » Après avoir mangé un sandwich dans un café plutôt luxueux, il se met au volant pour se retrouver à Tasman Lake, le plus grand glacier de Nouvelle-Zélande.

« Là aussi il y a foule », admet-il. Mais le marcheur solitaire, bifurque rapidement pour retrouver un sentier plus sauvage, où il observe moult espèces amphibies auprès de plusieurs lacs.
« Ça fait soixante-douze heures que j’ai pas pris de douche… J’ai fait couler quelques litres de sueurs ces trois derniers jours. Les batteries de l’appareil photo sont pleines de vide, alors pas le choix. »
Il est quinze heures bien tassées quand il se décide à reprendre la voiture pour réaliser les 3 h 30 de route le séparant du camping de ce soir. La route est belle, les paysages sont parfois très semblables aux steppes patagoniennes, je suis à nouveau surpris par ce pays, sourit-il. Arrivé au camping, je payerai seulement quatorze dollars néo-zélandais plus deux pour la douche… « C’est la bonne affaire après le plein d’essence qui ma coûté près de 100 NZD. » (Crédits : Flavien Saboureau)
« J’ai pris la location la moins onéreuse, sans réfléchir à la consommation. Elle a l’air de bien tirer », se rend-il compte. Au menu, pâtes au pesto, vidage de la poubelle, remplissage des batteries, et organisation de ses futures journées en rapport à la météo. « Encore une belle journée, demain mes mollets et mes cuisses devraient pouvoir se reposer. » Ses jambes soufflent en silence, se taisent mais apprécient religieusement un peu de repos. À suivre…
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