La polémique : de la Grèce antique aux JO de Paris2024
La cérémonie d’ouverture des jeux Olympiques de Paris 2024 a suscité l’émoi. Tout se passe entre le Sacré et le Profane. La controverse naît du possible amalgame entre deux tableaux. La première œuvre « La Cène » de l’Italien Léonard de Vinci, la seconde est « Le Festin des dieux » de l’artiste néerlandais Jan Hermansz van Bijlert. La tension mondiale et la mise en lumière de la France via les jeux Olympiques sacralisent les avis, ravivent les tensions et divisent les individus.
La dispute s’installe avec vigueur lorsque l’on s’installe dans la polémique.1 Ici, elle se situe entre profane et sacré. L’un est dépourvu de caractère religieux, par opposition au sacré. Comme le débat de justice lors du procès de Socrate en 399 avant notre ère. Au XVIIe siècle le profane est celui qui est contre le respect et la révérence qu’on doit aux choses de la Religion. Depuis la loi de séparation des Églises et de l’État du 9 décembre 1905 résulte du respect de chaque croyance, l’égalité de tous citoyens devant la loi, la garantie du libre exercice du culte. L’irrespect de la religion créer plus qu’une polémique dans certains pays, c’est un blasphème.
Deux tableaux, deux ambiances
Cette loi existe en France, comme le droit d’exercer le blasphème. Ce droit est issu de la loi sur la liberté de la Presse du 29 juillet 1881. Elle abroge l’article 1er de la loi du 25 mars 1822. Ce dernier relate le délit d’outrage aux religions reconnues par l’État. En ajoutant que ce soit pas voie de presse ou par tout autre moyen de publication.
Le terme « blasphème » ne revêt pas la même signification entre 1718 et aujourd’hui. Au XVIIIe siècle c’est une parole impie contre l’honneur de Dieu, comme toutes les choses divines et sacrées. Le dictionnaire de l’Académie française définit le blasphème tel que « emprunté du latin chrétien blasphemia, du grec blasphêmia, “médisance, calomnie” ».
Au XVIIIe siècle la définition est « parole impie, discours tenu contre l’honneur de Dieu, ou contre les choses divines & sacrées ». Tandis qu’actuellement est est la « parole qui outrage la divinité ou qui insulte la religion ». (Crédits : USCIRF)
En France, la population peut se targuer d’avoir le droit de blasphémer, voire de rire de tout, peut-être pas avec tous. Dans de nombreux pays, le blasphème est puni sévèrement. Des peines de prison à la peine de mort. Le blasphème est un crime selon les lois dans 84 pays, indique le dernier rapport de la commission américaine USCIRF. « 81 % des cas d’application de la législation par l’État ne concernaient que 10 des pays suivants : l’Arabie saoudite, le Pakistan, l’Iran, la Russie, l’Inde, l’Égypte, l’Indonésie, le Yémen, le Bangladesh et le Koweït. »
Le Festin des dieux
Le tableau réalisé par Jan Hermansz van Biljert au XVIIe siècle représente une scène mythologique où les dieux de l’Olympe se régalent ensemble. L’accent est mis sur le plaisir sensuel et la débauche, éléments souvent associés aux divinités gréco-romaines. L’arrivée de Philippe Katerine en Dyonisos, dieu grec du vin cristallise les réseaux sociaux.
Comme l’explique Fanny Herrero sur France Inter « à aucun moment la référence religieuse n’a été évoquée. Ce n’est pas du tout notre intention. […] C’est un tableau qui a été inspiré par les bacchanales, le Festin des dieux de l’Olympe […] Philippe Katerine incarne Dyonisos, donc on est vraiment dans une fête païenne. »
Les tableaux représentant des banquets sont nombreux. « Le Festin des Dieux » (1514-1529) par Giovanni Bellini et Titien, « Le Banquet de Cléopâtre » (1743-1744) par Giovanni Battista Tiepolo, « Le Festin de Balthazar » (1635) par Rembrandt, « Le Banquet des officiers de la garde civique de Saint-Adrien » (1627) par Frans Hals et « Le Festin dans la maison de Lévi » (1573) par Paolo Véronèse. Cette œuvre de la Renaissance vénitienne, était censé remplacer une Ultima Cena, l’œuvre du Titien, été détruite par un incendie.
La maison de Simon est régulièrement considérée comme le lieu où se déroule l’ultime repas du Christ et des disciples. La réalisation lui vaut une comparution devant le tribunal de l’Inquisition. Elle n’a rien à envier aux lois punissant le blasphème. Les sanctions sont à l’image des délits commis. Elles commencent par la simple pénitence jusqu’à la mort sur le bûcher. Sans oublier, l’amende, la confiscation des biens et le bannissement. La torture est employée pour obtenir des aveux. (Crédits : Par Jan van Bijlert RMN/Stéphane Maréchalle/Wikipedia)
La preuve de culpabilité ou d’innocence au Moyen-Âge est acquise par l’Ordalie. Pour un seul accusé, elle s’effectuait par l’eau froide, l’eau bouillante, le fer rouge et le feu. Lorsque deux personnes sont accusées et se renvoient la responsabilité, un duel à mort s’engage. Auparavant, chacun doit s’acquitter d’une somme suffisante pour couvrir les dépens, amendes et la réparation financière des dommages causés au survivant.
La Polémique
Ah, la polémique. Cette « querelle, dispute qui s’élève sur des questions de théologie, de politique, de littérature, etc., donnant lieu à des échanges publics suivis, à la publication d’écrits », définit l’Académie française. Ce terme du XVIe siècle est emprunté du grec polemikos, « qui concerne la guerre », qui est lui-même dérivé de polemos, « guerre ». En ces temps lointains, la polémique appartient à la dispute. « Il se dit proprement des disputes qui regardent la Religion. »
Elle permet aussi de focaliser l’attention sur un sujet, plus qu’un autre, tel le tour d’un magicien. Elles surviennent dans divers domaines, du politique au social, en passant par le culturel jusqu’au religieux… Elles choquent ou provoquent un débat.
La « quenelle » de Dieudonné (2013-2014) touche les questions de liberté d’expression, des limites, si tant qu’il y en à l’humour et sur les questions de l’antisémitisme. Le Burkini qui couvre les femmes de confession musulmane (2016). Le discours de l’ancien président Nicolas Sarkozy déclenche une polémique avec une seule phrase. « L’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire ». Ou la loi abrogée sur l’interdiction du port du pantalon pour les femmes en 2013. Et dernièrement le pins de la Présidente de l’Assemblée nationale.
La polémique à l’heure du tout numérique est une arme de destruction massive. Il suffit de jouer sur les mots, pour qu’en découlent des maux. (Crédits : Leonardo da Vinci/Milena Magnano/Collana I Geni dell’arte, Mondadori Arte, Domaine public/Wikipedia)
Elles sont des tempêtes dans un verre d’eau. La principale révélation est que le siècle de la communication n’en porte que le nom. Tout comme les documentaires de Maïa Mazaurette pour apprendre aux jeunes à se draguer, à se comporter en réel et non plus à travers des applications. À force de paraître à travers les smartphones, l’être humain devient comme les personnages du dessin animé de Walt-Disney Wall-E. De la polémique à la controverse, il n’y a qu’un mot.
Ce qui a engendré des conflits tels que l’affaire de Fachoda, l’incident de Sarajevo qui déclenche la Première Guerre mondiale. Celui du golf du Tonkin, comme la guerre des Malouines. Ce qui est sûr, c’est que la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris 2024 a défrayé la chronique, tant sur les réseaux que dans les chaumières, en France comme partout ailleurs. Peut importe que vous ayez aimé ou non, elle restera dans les mémoires, comme la cérémonie de clôture, car elle a provoqué un sentiment.
- https://www.cairn.info/revue-mil-neuf-cent-2007-1-page-45.htm ↩︎