
Flavien se remplume (13/55)
En ce jour de réveillon en métropole, Flavien se lève à tout juste 7 h. La journée commence par une routine agréable : le petit déjeuner. Moment qui est plus rare lorsque vous ouvrez votre toile de tente, en plein milieu de nulle part. Flavien en profite pour se remplumer au vu des prochaines étapes. L’objet du jour est la visite d’une baie, tout au fond de l’endroit où il mouille depuis hier soir. Ce matin, la mer est formée. Heureusement, moins de deux heures après le petit déjeuner, ils déboulent à Sandy Beach.
À 8 h 30, tous montent à bord des zodiacs pour se rendre au fond de la baie dans laquelle ils sont amarrés depuis la veille. « Il s’en est fallu de peu pour que l’on ne puisse pas débarquer , raconte Flavien. Sur la plage, la faune est partout, des milliers de manchots royaux et de gorfous de Schlegel m’entourent, sans parler des éléphants de mer. » L’aventurier du bout du monde photographie tout ce beau monde pendant plus d’une heure avant d’emprunter la passerelle aménagée pour mener à la colonie de gorfous de Schlegel.
Gargantua n’a qu’à bien se tenir
Malheureusement, elle est fermée à mi-chemin. Car les pétrels géants, espèce extrêmement sensible au dérangement, y nichent. « Ce sera tout de même l’occasion de photographier de magnifiques tapis de Pleurophyllum hookeri, dont trois pieds sont fleuris », se rassure Flavien. Il cherche en vain quelques insectes. Ces aptères sont timides, à moins que le froid ne freine les ardeurs de chacun. Accaparé par les mégafaunes qui l’entourent, il est surpris quant à l’arrivée des Zodiacs, deux heures plus tard. « Déjà ? Je n’ai pas vu le temps passer », appuie Flavien.
La température fraîche ce matin a frigorifié plus d’un explorateur. De retour à bord, Flavien s’offre un moment pour se réchauffer. « À ne pas bouger sous ce ressenti inférieur à zéro, qui plus est en se faisant rincer sur le zodiac, je n’ai vraiment pas chaud, malgré les cinq couches enfilées. »
Le corps mis à rude épreuve, rien de tel qu’une légère sieste pour reprendre des forces et de la chaleur, avant le repas de midi. Cet après-midi, ils retournent tous à terre pour une nouvelle heure sur cette plage, ils font durer le plaisir, pense Flavien. « L’équipage, dont je ne parle pas assez, est très sympa ! Les repas… Je n’en parle même pas… Une tuerie… Ça tombe bien, trop léger à mon départ, je vais prendre un peu de gras pour la suite de mon trip. » Une fois sur la plage, la brume matinale s’étant estompée, Flavien se métamorphose encore en paparazzi. (Crédits : Flavien Saboureau)

C’est entre 17 et 18 h que le bateau lève l’ancre. « Je récupère les enveloppes et cartes postales transmises pour qu’elles soient tamponnées sur Macquarie. Quel plaisir de découvrir cet estampillage, se réjouit-il ! Il est temps de faire mes adieux à cette île que je ne reverrai sûrement jamais, celle à la géologie si particulière, la seule à s’être formée sur la croûte océanique. » Durant le débriefing, le programme de la journée de mer de demain est dévoilé. « Elle est bien entendu dédiée à Noël, des repas à volonté s’annoncent, se languit Flavien. Puis un monsieur expérimenté nous présentera sa quête des manchots. Il a observé toutes les espèces dans sa vie. »
Un autre Noël… Loin des siens
Tel un habitué, Flavien feuillette les livres et documentations à la bibliothèque et teste le Wi-Fi pour le réveillon de demain. « Il faut payer 25 NZD pour la Wi-Fi. » Ce que refuse Flavien, mais la rumeur indique qu’il est possible de se connecter au Wi-Fi de l’équipage. Ils accèdent seulement à WhatsApp. « Chose faite ! Je le laisse allumé quelques minutes chaque jour, en cas d’urgence familiale. »

Jusqu’à ce soir, Flavien n’a envoyé aucun message depuis qu’il est en pleine mer. « Cap sur Campbell Island, la Mecque des mégaherbes », se réjouit-il en allant se faxer sous sa couette. Le lendemain, jour du réveillon de Noël, l’Heritage Adventurer se pare d’une ambiance particulière. Surtout lorsque l’on se trouve seul en ce jour, sans un membre de sa famille, comme Flavien.
La mélancolie le touche, ses yeux observent les croisiéristes, contemplent la joie qu’il partage avec pudeur. La journée alterne entre gourmandise culinaire et bibliothèque. « Ce matin, nous prenons un gros lunch qui remplace le petit déjeuner et le repas du midi. Ils mettent les petits plats dans les grands. » En début d’après-midi, ayant, pour une fois, du temps libre, « je monte écrire mes cartes à la bibliothèque. » Sauf que le besoin de réconfort et d’échanges lui procure des idées, enfin surtout une. « L’idée m’est venue d’allumer WhatsApp. » (Crédits : Flavien Saboureau)
Les deux heures censées être consacrées à l’écriture se passent à échanger par messages. Charité bien ordonnée commence par soi-même, dit le proverbe. Puis à 17 h, tous sont de retour à table. « Nous attaquons le second repas, qui dure deux trois heures avant la soirée à jouer. Un jeu de questions placé sous le signe de l’humour. » En ce jour, comme si l’océan avait décidé d’épargner les plus fragiles. L’océan est incroyablement calme pour ces latitudes, constate silencieusement Flavien. Le soir venu, il s’attelle à l’écriture de ses cartes postales. « J’en écris six, c’est pas si mal, vu comment c’était parti », s’amuse Flavien qui a recouvré le moral suite aux échanges par messages. À suivre…