dimanche, mars 17, 2024
Le saviez-vous ?

Quand les poules avaient des dents

L’expression qu’usent et abusent nos grands-parents pour signifier à quel moment ils feront ce que nous petits-enfants aimerions leur faire faire, alors qu’ils s’horripilent rien que d’y penser est « Quand les poules auront des dents ». Mais les poules n’ont-elles vraiment aucune dent ? Et le monde marin qu’en est-il ? Toutes ces questions méritent une réponse, afin de clouer le bec aux pique-assiettes, ou simplement engager la conversation et vous sentir comme un poisson dans l’eau, lors de soirée.

Hors mis l’expression, les gallinacés ont véritablement une dent, nommé « la dent de l’œuf » qui permet au poussin de casser la coquille. Selon une étude conduite par Derek Larson, paléontologue au muséum d’Alberta (Canada), parue dans Current Biology en 2015, il y a de quoi s’en placer sous la quenotte. Car, il y a 65 millions d’années, alors que les gros dinosaures avaient quasiment disparu de la surface de la planète, cohabitaient encore des oiseaux à bec et d’autres munis d’une dentition (héritée en droite ligne des grands sauropodes). L’histoire nous démontre que les premiers sont restés en supplantant les dentés. Selon l’étude en question, la graine serait responsable, ou plutôt une conséquence indirecte, de ce phénomène, je m’explique. La chute de la météorite créée une catastrophe planétaire. Les grands sauropodes (herbivores) furent décimés, dès l’instant où ils n’avaient plus rien pour casser la croûte. Car, si la végétation était rare et l’herbe encore plus (la majeure partie a été calcinée), cette étude démontre qu’à l’inverse, les graines étaient abondantes et c’est ainsi que les oiseaux à dentition se sont éteints alors que ceux à bec ont traversé les âges.

Contrairement à ce que l’on pense, le requin a un adversaire de taille, l’orque. Mais le principal prédateur et premier danger pour le requin reste l’homme. Car environ 100 millions de requins sont tués chaque année, dont 70 millions pour leurs ailerons. (Crédits: PublicDomainPictures/Pixabay)

À ce jeu, les scientifiques ont eu la dent creuse, en collectant et étudiant 3 104 dents fossiles. Ces dernières venaient de quatre familles différentes de maniraptoriens, des petits dinosaures de la taille d’un oiseau. Le but de leur recherche, suivre l’évolution de ce groupe au cours de 18 millions d’années (jusqu’à la fin du Crétacé). « Les dinosaures maniraptoriens ont maintenu un niveau de variation très stable pendant les 18 derniers millions d’années du Crétacé, raconte Larson. Ils se sont brusquement éteints juste à la limite ». Leurs données démontrent une extinction brutale des dinosaures maniraptoriens à dents. Certaines de ces données ont déjà été publiées, mais la plupart des informations proviennent du travail de Larson au microscope, qui a catalogué la forme et la taille de chaque dent. Cela suggéra que seuls les maniraptoriens munis d’un outil performant comme le bec, étaient capables de tirer profit de l’une des uniques sources de nourriture, alors disponible en abondance, la graine…

La nature se débarrasse de ce qui est inutile, ce qui ne l’est pas traverse les âges…

En 2006, Matthew P. Harris, biologiste du développement à l’Institut Max Planck de Tübingen (Allemagne) avait remarqué la présence d’excroissances bien aiguisées à la surface des mâchoires d’un embryon — âgé de seize jours — de poulet mutant nommé Talpid. Dans un article publié en février de la même année dans la revue Current Biology, les chercheurs avaient révélé que les excroissances présentaient un aspect conique et une forme de sabre comparables à ceux des dents des crocodiles. Une découverte pas particulièrement étonnante compte tenu du fait que les oiseaux sont des animaux phylogénétiquement proches des reptiles. « Il y a eu des dinosaures ressemblant à des oiseaux et dotés de dents jusqu’à la fin du Crétacé, où ils ont tous disparu très brusquement, explique Larson. Certains groupes d’oiseaux à bec ont peut-être pu survivre à l’événement d’extinction parce qu’ils étaient capables de manger des graines ».

De l’escargot à la baleine bleue

La première place est sujette à controverse. L’escargot bat tous les records en termes de quantité, car le mollusque possède plus de vingt mille « dents ». Le terme exact est denticules, il s’agit de petites pointes dures. Elles sont disposées en lignes serrées sur sa langue. Elles lui permettent de broyer les végétaux qu’il ingère. Les denticules de l’escargot sont composées de chitine, contrairement aux vertébrés dont les dents sont faites d’émail et de dentine.

Les escargots sont apparus sur la planète Terre, il y a 600 millions d’années, d’abord dans l’eau puis sur terre. Leurs « cornes » sont en fait des tentacules, les plus grandes sont les yeux, celles du dessous constituent un organe à la fois tactile et olfactif. (Crédits: Pexels/Pixabay)

Le poisson-chat (ameiurus melas) hors mis sa moustache, est pourvu d’une dentition exceptionnelle. Sa mâchoire compte pas moins de neuf mille dents. Très petites par rapport à la taille de sa bouche, elles s’alignent en rangées à l’entrée de sa gueule. Certains individus des trois milliers d’espèces que comprend la famille ont les dents flexibles. Lorsque l’on sait qu’il affectionne les rochers marins pour se nourrir en les raclant. La nature s’est adaptée, les dents souples ont moins de risque de casser. Puis les nageoires dorsales et pectorales présentent une excellente protection contre les prédateurs.

Les dents de la mer

Le film des années 1970, « Les Dents de la mer » (Jaws de Steven Spielberg) a contribué à la légende du requin. Il n’est peut-être pas le poisson qui a le plus de dents, mais il est celui qui les régénère le plus. Un requin possède entre trois cents et quatre cents dents, réparties sur plusieurs rangées. La particularité reste l’incroyable capacité du requin à régénérer ses dents, un rêve pour certains. Dans les premières années, elles tombent si souvent qu’une dent est remplacée toutes les quinze jours. À l’image d’un escalator, les dents de réserves sont repliées sur le palais et s’ajoutent à la chaîne des autres dents lorsque celles-ci avancent pour substituer une dent perdue ou cassée. Au cours d’une vie, un requin peut ainsi produire trente mille dents.

Les femelles peuvent atteindre 130 cm et peser plus de 20 kilos. Sa légende est issue de son appendice buccal, avec ses dents acérées. (Crédits : Krzysztof Niewolny/Pixabay)

Le brochet (esox lucius) possède une morphologie typique, reconnaissable à tous amateurs de pêche. Un corps allongé, une gueule en bec de canard, il mesure entre 30 et 70 cm. La distinction entre femelle et mâle est principalement l’âge, jusqu’à 25 ans pour ces dames, à peine le tiers pour les messieurs (7 ans). Surnommé le « carnassier roi », dû à ses 700 dents acérées extrêmement coupantes et aiguisées, il lui est très facile d’attraper les proies qui passent à ses alentours. Sa mandibule inférieure est munie de grosses canines, alors que son palais et sa langue sont couverts de petites dents, toutes dirigées vers l’intérieur. Cette originalité lui permet de piéger ses proies, sans leur laisser d’échappatoire. Un avantage à double tranchant, s’il se montre trop gourmand en attrapant une proie trop imposante, il risquera de mourir étouffé, car l’implantation de ses dents lui confère l’impossibilité de rejeter la proie de sa gueule.

Le tatou géant est à croquer

Premier mammifère au classement, le dauphin est nettement moins impressionnant que ses prédécesseurs. Il possède entre quatre-vingt-dix et cent dents, selon l’espèce. Elles sont toutes identiques, courbées vers l’arrière pour retenir les proies glissantes. Elles ne servent que de pince, car il avale ses gibiers sans les broyer. Les mammifères terrestres, sont la catégorie la moins dentée, sans doute parce que leurs dentures est diversifiée, donc plus efficaces (les mammifères sont hétérodontes). C’est en la matière le tatou géant (priodontes maximus), dont la denture est au contraire plutôt homodonte, qui vit en Amérique du Sud, qui remporte la palme avec entre 80 et 100 dents, selon son âge. Omnivore, même s’il se nourrit principalement de fourmis, de termites et d’araignées, il est en voie d’extinction.

Son seul prédateur est l’homme, qui le chasse pour utiliser sa cuirasse pour l’artisanat et sa chair comme aliment. Appelé Cabassou en Guyane, il est sur la liste des animaux menacés.
Son extinction a également pour cause la disparition de son biotope avec la déforestation et le développement de l’élevage. (Crédits : DR)

Entre cinquante et quatre-vingts dents composent la mâchoire puissante du crocodile. Il possède cependant un point commun avec le requin qui le rend plus dangereux, la régénération des dents. Imaginez que vous perdiez une dent de lait, lui la remplace très rapidement. Une dent a en général une durée de vie de dix-huit mois, ainsi le crocodile remplace sa dentition une cinquantaine de fois au cours de sa vie.

Le géant au ventre rose impose de sa présence en montrant ses canines. L’hippopotame possède de trente-six à quarante dents, à peine quelques-unes en plus que l’être humain (32 avec les dents de sagesse). Il détient le record des plus longues canines, jusqu’à soixante centimètres, ne lui servant qu’à combattre. Cet herbivore consomme une quarantaine de kilos de végétaux par nuit.

De l’éléphant à l’édentée

L’éléphant n’a que six dents : quatre molaires et deux défenses. Sur une durée comprise entre quatre et huit ans, il régénère sa dentition. Au cours de la période de renouvellement, il arrive que les nouvelles dents viennent pousser les anciennes, pas encore tombées. Chose impressionnante, le pachyderme prend alors trois cents kilos. Ses dents sont en fait tellement lourdes qu’il gagne et perd trois quintaux entre l’apparition des nouvelles la complète régénération de la dentition.

Les animaux sont des êtres à part entière, ils sont au même titre que l’être humain primordial et indispensable à la planète Terre, la Pachamama. (Crédits: Sasin Tipchai/Pixabay)

La baleine bleue, appelée aussi rorqual bleu, est une espèce de cétacés de la famille des Balaenopteridae. Elle peut dépasser 30 mètres de longueur et 170 tonnes, c’est le plus gros animal vivant à notre époque et dans l’état actuel des connaissances, le plus gros ayant vécu sur Terre. Mais le plus gros animal de la planète n’a pas de dent, à la place, elle a des fanons. À chaque fois qu’elle ouvre la bouche, la baleine aspire de l’eau, qui sera expulsée à travers les fanions tandis que sa nourriture en reste prisonnière. Chez la baleine bleue, les fanons peuvent mesurer un mètre, et contiennent de la kératine, comme nos cheveux. Grâce aux squelettes et aux carcasses retrouvés, le tout combinés avec les connaissances sur la vitesse de nage, les chercheurs ont pu ainsi modélisé qu’un rorqual bleu de 25 m pouvait engloutir jusqu’à 80 000 litres (80 m3) en une seule bouchée, tandis que l’être humain, est en moyenne à 0,07 litre.

Chassée durant des décennies pour son huile utilisée comme combustible dans l’éclairage public, la baleine bleue a frôlé de peu l’extinction dans les années 1960. L’interdiction de la pratique a offert un court répit à l’espèce, qui reste menacée par le réchauffement climatique et la pêche illégale. (Crédits : Conservation Nature)

Si vous acceptez d’élargir votre définition de la dent, c’est une limace des mers (umbraculum umbraculum) qui brillerait de mille feux en souriant sur une photo. Dans sa bouche, sur sa surprenante langue, des centaines de milliers de minuscules épis chitineux constituent ce que les spécialistes appellent une radula. Comme chez le requin, au fur et à mesure que ces dents s’usent, il s’en forme de nouvelles à l’arrière. Pour atteindre, tout au long de sa vie, le nombre ahurissant et peu croyable de 750 000.

Fidel Plume

Équilibriste des mots, j'aime à penser qu'il existe un trésor au pied de chaque arc-en-ciel. Un sourire éclaire la journée de la personne qui le reçoit. Elizabeth Goudge disait : « La gratitude va de pair avec l'humilité comme la santé avec l'équilibre. »

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