dimanche, mars 17, 2024
Société

Robert Hébras, dernier survivant du massacre d’Oradour-sur-Glane est décédé

Il se battait pour que la mémoire subsiste, pour les tragiques instants d’Oradour-sur-Glane ne tombent dans l’oubli. Il est décédé le samedi 11 février 2023 à Saint-Junien en Haute-Vienne. Il n’avait pas encore 19 ans lorsque le régiment Der Führer de la Panzerdivision blindée Das Reich de la Waffen-SS investit et encercle son village, le 10 juin 1944. C’est la dernière fois qu’il verra sa mère, ses deux sœurs, Georgette, 22 ans et Denis 9 ans. Toutes trois périrent dans l’église.

Il y a 78 ans, 8 mois et trois jours que le massacre d’Oradour-sur-Glane a eu lieu. Dorénavant, le village martyr de Haute-Vienne, comme le village tchèque de Lidice (10 juin 1942), celui du Frayssinet-le-Gélat le 21 mai 1944 ou encore à Ascq dans la nuit du 1er au 2 avril 1944, sont des lieux de mémoires. Ce qui est frappant est le silence qui règne. Personne n’émet un son plus haut que l’autre, les discussions sont à pas feutrés. Chaque visage scrute les vestiges d’un village exterminé par la sauvagerie d’être humain.

Lors de la découverte des ruines d’Oradour pas un son ne s’entend. Que ce soit en famille, en couple ou bien seul, seuls les oiseaux semblent être autorisés à rompre ce silence assourdissant. Les personnes qui déambulent, semblent retenir leurs pas, de peur qu’ils ne soient bruyants. Les murs sont écroulés, les toitures envolées, les voitures, bicyclettes, jeux d’enfants brûlés… On ne peut, ni prétendre, ni même oser, imaginer un instant l’horreur vécue par ces innocents. Ce sont 643 individus qui sont assassinés le 10 juin 1944, 205 enfants, 241 femmes et 197 hommes. Robert Hébras œuvrait pour la paix, pour la mémoire des Hommes, pour que personne n’oublie l’impensable.

Le village plein de vie avec ses enfants de part et d’autre de la rue Émile Desourteaux, avant le fatidique 10 juin 1944 14 h. (Crédits : Blog Résistance Française)

Les femmes et enfants sont enfermés dans l’église (actuellement en travaux). Deux soldats y déposent une caisse de grenades asphyxiantes, allument les mèches et sortent en condamnant les portes. Celles qui ne sont pas mortes d’asphyxie furent abattues ou brûlées vives, comme leurs enfants. La volonté de vivre, eut raison de la porte de la sacristie fermée, où se trouvait de l’air encore respirable.

Les soldats nazis s’en étant aperçus, ils assassinèrent froidement ceux qui s’y étaient réfugiés. Une seule femme survit à cet enfer, Mme Rouffanche. Son témoignage sur le site « Résistance Française » est glaçant.

L’église d’Oradour-sur-Glane après l’assassinat de masse perpétré envers les enfants, femmes et hommes par des soldats et officiers nazis déterminés. Dans la sacristie existaient trois fenêtres, le vitrail brisé permit à Marguerite Rouffanche de survivre au massacre. (Crédits : Blog Résistance Française)

À l’aide d’un escabeau, elle se hissait jusqu’à la plus grande ouverture. « […] Je ne sais alors comment j’ai fait, mais mes forces étaient décuplées. Je me suis hissée jusqu’à elle, comme j’ai pu. Le vitrail étant brisé, je me suis précipitée par l’ouverture qui s’offrait à moi. J’ai fait un saut de plus de trois mètres », expliquait-elle. Une femme la suivit dans cette fuite vers la vie. Elle laissa choir son bébé au sol, avant de sauter à son tour. Mais les cris du poupon alertèrent les Allemands qui firent feu en direction des deux femmes et du bébé. « Ma compagne et le poupon furent tués. Je fus moi-même blessée en gagnant un jardin voisin. Dissimulée parmi les rangs de petits pois, j’attendis dans l’angoisse qu’on vienne à mon secours. Je ne fus délivrée que le lendemain vers 17 heures. »

Les soldats nazis recouvraient de paille, de bois et d’huile les cadavres. Ils mirent le feu à l’ensemble pour masquer leurs crimes. Touché à la poitrine, au bras et à une jambe, Robert Hébras réussissait à s’échapper de la grande Laudy : « Quitte à mourir, mieux vaut être exécuté que brûlé vif ». (Crédits : Romuald Pena)

Ce 10 juin 1944, alors que les maisons sont toutes vidées, les femmes et enfants sont à l’intérieur de l’église, les hommes sont scindés dans les différentes granges du village. Accompagné dans cette marche forcée, Robert Hébras et son ami Henri ne se quittent pas, ils discutent puis arrivent à ladite grange Laudy. Ils se retrouvent avec 60 autres hommes dans la grande Laudy, l’attente est longue. Une heure durant, une interminable heure, ils font face aux nazies affublées de mitraillette, jusqu’à ce que…

Sur le fronton de ce qui reste de la gare d’Oradour-sur-Glane, cinq lettres sont restées pour former le mot « Orage », qui s’est abattu sur le village. (Crédits : Romuald Pena)

« Robert et Henri se remettent à discuter du match de foot qu’ils doivent disputer le lendemain. Ils vont s’asseoir sur des bottes de foin, tout au fond. […] Les soldats nettoient sommairement le parvis de la grange. Ils s’y allongent ensuite, adoptant la position du tireur couché, et arment leurs mitrailleuses… » (extrait du livre « Le dernier témoin d’Oradour-sur-Glane » de Mélissa Boufigi aux éditions Harper Collins).

Fidel Plume

Équilibriste des mots, j'aime à penser qu'il existe un trésor au pied de chaque arc-en-ciel. Un sourire éclaire la journée de la personne qui le reçoit. Elizabeth Goudge disait : « La gratitude va de pair avec l'humilité comme la santé avec l'équilibre. »

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