La RDA est née un 7 octobre
Il y a tout juste 75 ans naissait la République Démocratique Allemande (RDA). Elle est située dans la zone d’occupation soviétique, et est la réponse au bloc soviétique de la fondation de la République Fédérale Allemande (RFA) quelques mois plus tôt. La capitulation sans condition de l’Allemagne nazie scinde le Pays des Poètes et des Penseurs en quatre zones. Des tractations entre pays se déroulent. L’entente cordiale ne dure qu’un temps. Les différences perspectives conduisent l’Allemagne à se découper en deux États.
Les tensions sont nombreuses après la Seconde Guerre mondiale. Les Soviétiques ne se laissent pas intimider. Ils provoquent le blocus de Berlin, en juin 1948. Celui-ci coupe les relations terrestres et fluviales avec la trizone. Le blocus est levé moins d’un an après. En mai 1949, le pont aérien des États-Unis pour ravitailler la ville en engendre la chute. Mais la partition de l’Allemagne est inévitable.
L’Allemagne scindée en deux
À la sortie de la Seconde Guerre mondiale, les avis sont unanimes : tous les Allemands sont coupables. La défaite de l’Allemagne nazie en mai 1945 divise le pays en quatre zones d’occupations. Elles sont contrôlées respectivement par les États-Unis, le Royaume-Uni, la France, et l’Union soviétique, la capitale Berlin, subit le même sort. Sauf qu’elle se trouve dans la zone soviétique. Le communiqué final de la Conférence de Postdam, le 2 août 1945 se découvre un mois avant la reddition du Japon. À la table des décideurs : Joseph Staline, Harry Truman et Clément Attlee.

L’article XIII est sans équivoque : « Les trois gouvernements, après avoir examiné la question sous tous ses aspects, reconnaissent qu’il y aura lieu de procéder au transfert en Allemagne des populations allemandes restant en Pologne, en Tchécoslovaquie et en Hongrie […] ils estiment que le conseil de contrôle doit d’abord étudier le problème en tenant compte particulièrement de la répartition équitable de ces Allemands entre les différentes zones d’occupation. […] »
Entre 1945 et 1949, environ quatorze millions d’Allemands sont expulsés des pays d’Europe centrale et orientale, dont la plupart sont natifs, pour être déportés en Allemagne. Étant partis le plus souvent qu’avec ce qu’ils portent. La réalité de ces expulsions, dont le livre de Keith Lowe L’Europe barbare : 1945-1950 recense de nombreux témoignages, était d’une immense brutalité, relate Sophia Berrada. (Crédits : Tribune de Genève)
« Plus de 600 000 Allemands ont trouvé la mort lors de cet exode : de faim, de froid, de maladie, violés ou abattus par des soldats soviétiques, des partisans ou des civils ». Ceux qui arrivent dans un pays inconnu sont dépourvus, le plus souvent, de moyen de subsistance et de logement. C’est un facteur d’accentuation de la crise socio-économique qui perdure jusque vers 1948-1949.
Une Allemagne, deux États
Les positions effectives des troupes d’occupations sont en accord avec le protocole de Londres, du 12 septembre 1944. À l’article premier, il est indiqué que : « L’Allemagne, à l’intérieur de ses frontières telles que celles-ci existaient au 31 décembre 1937, sera divisée pour les besoins de l’occupation en trois zones, une de ces zones étant attribuées à chacune des trois Puissances, et en une zone spéciale pour Berlin qui sera occupée conjointement par les trois Puissances. »
À la conférence de Yalta, le triptyque conçoit à ce que la France participe à l’occupation. « À la condition cependant que la zone française soit prélevée sur les zones occidentales et non sur le territoire destiné à l’occupation soviétique », écrit Horst Möller (Les changements de la politique d’occupation en Allemagne de 1945 à 1949, de Horst Möller. Pages 85 à 99).
Lors de la Conférence de Potsdam en 1945, il est décidé à préserver l’unité économique de l’Allemagne. Les conditions de vie en Allemagne étant misérables, les États-Unis ont proposé une administration économique centrale. L’Union soviétique et la France ont rejeté ce plan. Durant une conférence, États-Unis et Grande-Bretagne en septembre 1946 s’accordent sur la décision préliminaire de création d’une « bizone ». Très rapidement, des divergences apparaissent. C’est également dans le but d’endiguer la poussée communiste, que les zones américaines et britanniques fusionnent. Elle jette à long terme les bases de la RFA.
(Crédits : Zones d’occupations en 1946/GlobalSecurity)

La France se joint au duo ainsi créé pour former la « trizone » en mars 1948. Ainsi les pays de l’Ouest soutiennent une certaine idée de reconstruction sous un régime démocratique. L’URSS, quant à elle envisage un État communiste sous son contrôle. La réforme monétaire favorise la division de l’Est et de l’Ouest. La division finale s’opère en 1949. La trizone devient la République fédérale d’Allemagne (RFA), en septembre. À l’est se constitue la République démocratique d’Allemagne (RDA), le 7 octobre 1949.
De la réparation à l’industrialisation
Le pacte de « Varsovie » (en russe : Организация Варшавского договора) est conclu le 14 mai 1955. C’est un traité à but économique, politique et militaire, conçu par Nikita Khrouchtchev. Son but est, dans le cadre de la guerre froide de proposer un contrepoids à l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN). Par la suite, la RDA est proclamée État indépendant par le traité du 20 septembre 1955.

Des réformes apparaissent : nationalisation des industries, collectivisation des terres agricoles, centralisation de l’économie et un contrôle strict de l’appareil d’État par le parti socialiste unifié (SED). La doctrine de « démocratie populaire » prônée par les autorités soviétiques devient la norme. Un parti politique unique, où toute opposition est réprimée par la Stasi.
« En 1950, 75 % de la production industrielle était passée sous le contrôle de l’état. » Concernant l’agriculture, elle est totalement collectivisée. Elle compte 19 000 coopératives d’une superficie moyenne de 280 hectares. L’avènement des années 60 et 70 rebat les cartes, une certaine « capitalisation » dans un monde communiste.
(Crédits : l’Humanité/BnF/Gallica)
Les mesures économiques de chaque plan proposé sont un échec. Le gouvernement s’en tient donc à une gestion centralisée. Tout comme l’industrialisation dans les années 80. Les principales industries sont regroupées en combinats. Une vision du futur pour l’évolution technologique.
Le mur et la réunification
Une enceinte fortification s’érige dans la nuit du 12 au 13 août 1961. Les autorités de la RDA séparent leur zone des zones sous occupation américaine, anglaise et française, à Berlin. Des policiers et des ouvriers sont à l’œuvre. Ils dépavent les accès routiers de la zone appelée Berlin-Est et Berlin-Ouest. Des barbelés sont tendus, des fossés creusés, le mur se construit peu à peu.
Dans les jours qui suivent, les autorités est-allemandes parachèvent la construction. Tout ensemble urbain se trouvant sur la ligne de démarcation doit être isolé. Les liaisons ferrées sont coupées, les fenêtres et les portes sont murées, comme la parole.
En effet, les autorités freinent l’exode vers l’ouest. Depuis 1949, trois millions de personnes sont passées de l’autre côté. L’histoire estime que 5000 personnes sont passées durant ces 28 ans, mais au moins 1000 ont été tuées en fuyant la RDA ou décédèrent à la suite d’accidents ou de suicides en tentant de le faire.
Les caractéristiques sont dantesques. La longueur de la ceinture autour de Berlin-Ouest : 155 km. Sur lesquels se disposaient 302 tours de contrôle, 259 unités de chien de garde, 93 miradors, 20 bunkers. Le mur mesurait 3,6 m de haut, 1,2 de large et une profondeurs au sol de 2,1 m. (Crédits : Thierry Noir, Bethaniendamm à Berlin-Kreuzberg, 1986/Wikipedia)

Du 13 août 1961 au 9 novembre 1989, le mur a existé, durant 10 315 jours le peuple allemand a été séparé. À l’instar de Nelson Mandela, incarcéré du 5 août 1962 au 11 février 1990, s’inspirant de la pensée Ubuntu, il soutient la réconciliation. En Allemagne, les manifestations du lundi commencent à Leipzig, un certain 4 septembre 1989, jusqu’au jour du 9 novembre. La RFA et la RDA ne font plus qu’une seule et même Allemagne, depuis le traité du 3 octobre 1990, qui est désormais férié. Les traces de ce traumatisme et de la participation sont encore sensibles, 35 ans après la chute du Mur de Berlin.