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Ma voiture électrique est-elle écologique ?

De prime abord, cela semble logique. La transition énergétique pour la croissance verte votée le 17 août 2015 a l’air d’adopter la « bonne » direction, car il est prévu l’installation de sept millions de bornes de recharge pour véhicules électriques, mais pas seulement. Le renouvellement des flottes de l’État et de ses établissements publics avec au moins 50 % de véhicules propres est acté. De quelle manière est produite l’électricité ? Les voitures sont-elles réellement propres ?

À l’heure de la prise en compte que la planète Terre est unique, et que nous vivons dessus. Les questions sur la pollution engendrent des discussions dans chaque foyer. La distance entre le domicile et le lieu de travail s’allonge, ce qui nécessite un moyen de locomotion. La voiture thermique est-elle polluante ? La réponse est oui, mais est-ce que la voiture électrique est écologique ?

Écologique, ma voiture électrique ?

Premièrement, la voiture électrique n’est pas née d’hier. Les premiers modèles du genre apparaissent au XIXᵉ siècle. Grâce à l’amélioration des batteries effectuée par deux ingénieurs français, Gaston Planté en 1859, puis Camille Faure en 1881, l’essor de ces véhicules arrive. Ainsi l’Exposition internationale d’électricité à Paris, du 15 août au 15 novembre 1881. La première automobile à se placer au départ d’une course le fera en 1895, pour la célèbre Paris-Bordeaux. Elle devra abandonner sur le retour à Orléans, l’autonomie était d’environ 50 km à la vitesse moyenne de 24 à 30 km/h.

Voiture, jamais, contente

Pièce phare du musée du château de Compiègne (60), la « Jamais Contente », est une voiture électrique conçue et conduite par le Belge Camille Jénatzy. Elle fut la première automobile à franchir le cap des 100 kilomètres par heure, le 29 avril 1899, sur la plaine d’Achères (78). Le pilote et son épouse aux Tuileries.

Il était nécessaire de disposer de batteries de rechange tout le long du parcours. La vitesse n’est pas encore la préoccupation principale. Ce n’est que huit années plus tard que la « Jamais Contente » passe la barre des 100 km/h.

Pour cause, elle possédait deux moteurs à propulsion électrique ainsi qu’une nouveauté révolutionnaire, des pneus en caoutchouc… Mais le bouleversement électrique attend patiemment durant de très nombreuses années, au fond d’un garage, rangé dans une boite en carton. (Crédits : DR)

À croire que les hommes ont toujours préféré, et de loin, la vitesse à la durée, un concept qui amène à réflexion pour comprendre bien des choses de la société, bref… Pour autant, il ne faut pas confondre vitesse et précipitation, ici ou ailleurs.

La fée Électricité habite depuis notre quotidien. Nous avons tous en tête l’image de Benjamin Franklin sous l’orage, à ne pas confondre avec la tortue nommée Franklin, ou Benjamin au Québec… Revenons au citoyen des États-Unis et à son cerf-volant. En juin 1752, ce dernier eût attaché une clé métallique au bas de la corde de l’ensemble, puis l’aurait fait voler au sein d’un orage.

Démontrant par l’expérience que la foudre était de nature électrique. Ce n’est que plus d’un siècle après que la première centrale de production naissait. En 1868, Zénobe Gramme améliorait la dynamo, une décennie passait, pour que William George Armstrong alimente ses bâtiments de ferme et son habitation d’une centrale hydroélectrique de 7 kW, en courant continu. (Crédits : Colin Behrens/Pixabay)

Ampoule;image, prise

Ce n’est qu’en 1890 que le courant alternatif apparaît. La révolution industrielle est en marche. L’invention de l’électricité fut lumineuse. Elle est devenue indispensable, voire vitale pour de nombreux pays et populations.

Comment est-elle produite ?

Le site de Réseau de transport d’électricité (RTE) affiche la couleur quant à la production, de manière journalière. Les diverses ressources sont le solaire, le fioul, le charbon, les bioénergies, l’hydraulique, le gaz, l’éolien et le nucléaire. Les données sont simples et claires, la production est comme ce qui suit :

Type d’énergieProduction en MégawattPourcentage
Nucléaire335 40067,1 %
Hydraulique65 10013 %
Éolien39 7007, 9 %
Gaz34 5006, 88 %
Solaire12 6002, 5 %
Bioénergies9 6001, 9 %
Charbon et Fioul3 1000, 6 %
La production française d’électricité en 2020 par filière sur l’ensemble du territoire tire son bilan. (Sources : RTE)


Comment comparer les différentes énergies, l’éolien peut-il compenser à sa mesure ? Car pour produire 5,7 TWh en 2017, soit l’équivalent des deux réacteurs de la centrale nucléaire de Fessenheim (fermée le 29 juin 2020), 262 éoliennes en mer ou 900 terrestres sont nécessaires. Actuellement 10 518 mâts (au 1er janvier 2025) sont déployés, qui devrait atteindre pratiquement 13 000 en 2028, comme l’explique Le Figaro. Mais leurs installations échauffent les tensions, comme dans les Hauts-de-France, où Xavier Bertrand, président du conseil régional, et candidat déclaré à l’élection présidentielle de 2022, propose que tout projet d’implantation soit soumis à un référendum local.

EDF, énergies, renouvelable

Rappelons qu’au préalable, des enquêtes publiques sont réalisées, et que la loi a été modifiée comme l’indique le rapport sur l’« Économie circulaire dans la filière éolienne terrestre en France », en page 14. Par exemple du 15 avril au 18 mai 2021, pour les communes de Fontaine-le-Sec et Forceville-en-Vimieu, toutes deux dans la Somme, ladite enquête est disponible sur le site de la préfecture de la Somme. « Les éoliennes défigurent le paysage, pourrissent la vie des riverains et coûtent un fric fou », explique-t-il. Qu’elles soient sur terre ou en mer, la facture a atteint 1,93 milliard d’euros.

Le mix d’énergies, que revendique EDF, utilisé pour produire l’électricité en France, est nucléaire pour trois quarts, les énergies renouvelables représentent moins d’un sixième du total, avec 13,6 %, dont 9,8 % dus à l’hydraulique. (Crédits : EDF)

Le coût d’un parc éolien terrestre, vendu clé en main, oscille entre 1,4 à 1,6 million pour une production d’un mégawatt. Il faut ajouter le prix de l’entretien, du recyclage… souligne le rapport Nᵒ 2019/Nᵒ 01/CGE/SG du ministère de la Transition écologique et solidaire. « La nouvelle programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) prévoit d’atteindre pour l’éolien terrestre 24,6 GW en 2023 et entre 34,1 et 35,6 GW en 2028. […] rendre obligatoire d’ici 2023 le recyclage des matériaux constitutifs des éoliennes lors de leur démantèlement […] favoriser la réutilisation des sites éoliens en fin de vie pour y réimplanter des machines plus performantes ». Donc, la consommation de la voiture électrique est « écologique » à 23,4 %, par des énergies renouvelables dans la production 2020. De plus, la production électrique a reculé de 7 % en 2020, son niveau le plus bas depuis 2009. La production nucléaire est en baisse de 11,6 % en raison de la crise sanitaire et des mesures de confinement qui ont perturbé le calendrier de maintenance des réacteurs.

Qu’en est-il de ses composants ?

Les véhicules, qu’ils soient à moteur thermique ou électrique, émettent de la pollution. Pollution qui existe pendant l’extraction des matières premières, lors de la construction, de l’utilisation et du recyclage, donc nous polluons chaque jour. Néanmoins, la société nous sollicite à travers différentes obligations (travail, alimentations, scolarité…). La voiture électrique se caractérise par une recharge, le passage de l’électricité alternative en continu (transformateur), la batterie… de nombreuses ressources nécessaires sont extraites des réserves de terres rares.

Bloc, tableau, stat

Selon les écrits de Didier Julienne, les terres rares ne le sont pas ! En effet, sans être de l’infox, « métaux rares » est un abus de langage. Leur découverte date de la fin du XVIIIᵉ et du début du XIXᵉ siècle. La langue française régissait les échanges internationaux à l’époque. L’emploi du terme « terre » désigne les minéraux, d’où la confusion. Les minéraux se définissent par : « Tout corps non organisé, qui se trouve dans l’intérieur de la terre ou à sa surface, tels que métaux, pierres, substances combustibles ».

Réserves en milliers de tonnes d’oxydes de terres rares dans le monde en 2019. (Crédits : Statista)

Ainsi les terres rares regroupent dix-sept métaux : le scandium, l’yttrium, et les quinze lanthanides (Lanthane, Cérium, Praséodyme, Néodyme, Prométhium, Samarium, Europium, Gadolinium, Terbium, Dysprosium, Holmium, Erbium, Thulium, Ytterbium, et Lutécium).

La consommation de minerai ou de terres rares diffère : Une éolienne demande 17 kg de terres rares (10 518 éoliennes) ; Une voiture électrique consomme entre 5 et 9 kilogrammes de cobalt ; Un ordinateur dispose de 30 g de cobalt ; Un smartphone de 5 à 10 g de cobalt.


Abondant au sein de la croûte terrestre, leur exploitation n’est pas, au moment de leur découverte, chose facile. Leur consommation croît depuis 1970, ainsi l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) affirme que les besoins mondiaux se chiffrent à 130 000 tonnes par année.

Ci-contre des fragments purs (99,9 %) de cobalt, raffinés par électrolyse, à côté d’un cube d’1 cm3 de cobalt de pureté (99,8 % = 2N8), pour comparaison. (Crédits : Alchemist-hp/Pixabay)

Terre rare, cobalt, minerai


Concernant le rapport de production d’électricité en les éoliennes et une centrale nucléaire, connaissez-vous le rapport ?. « Si l’on veut tout de même répondre à la question de façon stricto sensu, posons les bases. Prenons une production d’énergie annuelle moyenne de 1800 MWh pour le nucléaire (correspondant à l’ancienne centrale nucléaire de Fessenheim), et de 3 MWh par éolienne pour l’éolien. En prenant en compte le facteur de capacité de chacune de ces énergies, respectivement de 70 et 21 %, il faut un peu plus de 4 000 éoliennes terrestres pour remplacer une centrale nucléaire de la taille de Fessenheim », explique le site Transition écologique.

D2sert, Chili, volcans

Le lithium ne fait pas partie des terres rares, pourtant présent dans la croûte terrestre. Selon l’ONU, en 2018, seul un pour cent de terres rares est recyclé.

L’Ademe dans son rapport affiche des données pour l’extraction de minerai. Ainsi il est nécessaire de puiser respectivement, pour un kilo de vanadium, de cérium et de gallium, 8,5 tonnes, 16 tonnes et 50 tonnes de roches. Ensuite la purification d’une tonne de roches demande 200 m³.

L’extraction du lithium contribue à la dégradation de l’environnement, à la dégradation des paysages et à la contamination des sols selon la CNUCED, comme le salar d’Atacama qui est le dépôt salin le plus grand du Chili. (Crédits : Francesco Mocellin/Wikipedia)


La demande accrue de matières premières pour les batteries des voitures électriques semble inéluctable. Car elles ont augmenté de 65 % en 2018 par rapport à l’année précédente, pour atteindre 5,1 millions de véhicules. « Cette hausse devrait même atteindre 23 millions en 2030, selon l’Agence internationale de l’énergie », relève la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED).

Quid des batteries ?

Selon les chiffres, la voiture de marque Renault dite « Zoé » est le véhicule à moteur électrique le plus vendu en Europe (99 432 en 2020, devant la « Tesla Model 3 » 85 979). La batterie la plus utilisée est composée de lithium-ion, donc du lithium, mais aussi de cobalt, nickel, manganèse. Il est le 33ᵉ élément le plus abondant sur terre, et peut être extrait par lixiviation de roches magmatiques dites pegmatites (l’Australie-Occidentale est 1ᵉʳ producteur mondial), dans une moindre mesure de granite, mais également d’argiles (Nevada, États-Unis — Sonora, Mexique).

Vitesse (km/h)Température (°C)ChauffageClimatisationAutonomie (km)
13035nonoui206
130-15ouinon149
8035nonoui266
80-15ouinon165
5035nonoui301
50-15ouinon173
3035nonoui319
30-15ouinon177

La meilleure autonomie, selon le simulateur, est de 409 km pour une vitesse de 30 km/h à une température de 20 °C en mode économique. La recharge à 80 % pour une autonomie de 317 km est de 29 h 34 sur une prise domestique, et 1 h 5 en charge rapide. (Sources : Renault)


En outre, à partir de réservoirs de saumures naturellement riches en sels de lithium, sodium et potassium localisés sous le lit de lacs salés, notamment au Chili, en Amérique du Sud. L’extraction du lithium utilise près de 65 % de l’eau de la région de Salar de Atamaca, l’une des zones désertiques les plus sèches du monde, pour pomper les saumures des puits forés. « Cela a provoqué l’épuisement et la pollution des eaux souterraines, obligeant les agriculteurs locaux de quinoa et les éleveurs de lamas à migrer et à abandonner les établissements ancestraux. » Jusqu’à présent, aucune solution viable économiquement n’a été jusqu’ici proposée pour extraire le lithium de l’eau de mer. Une batterie est à remplacer dès que ses capacités deviennent inférieures à 70 %, indiquent les constructeurs automobiles, ce qui arrive en général au bout de 8 à 10 ans d’utilisation normale, en fonction de la vitesse, de la température extérieure, de l’utilisation de climatisation ou chauffage. La garantie d’une batterie est, pour la majorité des offres, de 8 ans, comme sa baisse de recharge. Chez Renault, un simulateur est disponible en ligne pour la « Zoé »,

La pollution dite « grise »

Qu’est-ce que la pollution ? C’est l’action de souiller par des ordures. Autrement dit, le fait de laisser ici et là des déchets qui ne sont pas assimilables par la nature. La science de la molysmologie est celle qui étudie les pollutions. Futura-Sciences la définit par la science de la pollution et des problèmes posés par les différents types (comme la pollution lumineuse) et le comportement de leurs polluants (origines, voies de transfert, transformations, effets…).

La pollution grise, ou énergie grise est plus pernicieuse. Elle est la quantité d’énergie consommée lors du cycle de vie d’un matériau ou encore d’un produit. Son cheminement suit des étapes : la production, l’extraction et le transport des matières premières, la transformation, la fabrication, le transport, la mise en œuvre, l’entretien, sa commercialisation et enfin le recyclage.

« L’extraction nécessite beaucoup d’énergie, dans des pays où l’électricité est le plus souvent produite à partir d’énergies fossiles. Sur place, ces activités peuvent également provoquer des pollutions des sols ou des cours d’eau. Pour ne rien arranger, ces métaux pourraient venir à manquer dans les années à venir, surtout le cobalt », commente EDF. (Crédits : Jean-Brice Lemal [Planimonteur], Pagecran)

Zpé, batterie, électrique

La voiture électrique n’est donc ni la promesse d’une mobilité immaculée, ni le mirage d’une révolution sans contrepartie. Rappelez-vous que toute énergie utilisée produit des déchets, avant, pendant et après, il faut choisir entre bénéfice et risque. Elle déplace les pollutions plus qu’elle ne les efface : moins de gaz d’échappement dans nos villes, mais davantage de pressions sur les sols, les mines et l’eau dans d’autres régions du monde. Son impact dépend du mix électrique qui l’alimente, des conditions d’extraction des métaux rares et de la capacité à recycler ses batteries. Au fond, la question principale n’est peut-être pas de savoir si la voiture électrique est « écologique », mais si notre rapport collectif à la mobilité peut le devenir. Car le véritable enjeu n’est pas seulement la nature du moteur, mais la place que nous choisissons de donner à la voiture dans un monde contraint par ses ressources finies.

Fidel Plume

Équilibriste des mots, j'aime à penser qu'il existe un trésor au pied de chaque arc-en-ciel. Un sourire éclaire la journée de la personne qui le reçoit. Elizabeth Goudge disait : « La gratitude va de pair avec l'humilité comme la santé avec l'équilibre. »

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