Le professeur Luc Montagnier multiplie (2de partie)
Le nombre des publications, des citations ou des ouvrages de l’homme impressionne. La bibliothèque nationale de médecine et le centre national d’information sur les biotechnologies en recensent par moins de 319. De la transduction de l’information de l’ADN par l’eau et les ondes électromagnétiques aux Mycoplasmes associés au SIDA en passant par le stress oxydatif dans la médecine des soins intensifs, le professeur Montagnier à couvert une partie non négligeable de domaines qui piquait sa curiosité scientifique.
Tous se remémorent l’année 2008, lorsqu’il recevait le prestigieux prix Nobel de Médecine. Son parcours, hors mis l’Institut Pasteur à Paris, débutait à la faculté de Poitiers sous la houlette de son mentor Pierre Gavaudan. Ce, avant de s’envoler pour l’Angleterre puis à Glasgow en Écosse entouré de Michael Stoker et Renato Dulbecco dans les années soixante. Au sein du laboratoire de Kingsley Sanders à Carshalton, près de Londres, il identifiait pour la première fois un ARN infectieux à double brin provenant de cellules infectées par le virus de l’encéphalomyocardite murine (EMCV), un petit virus à ARN monocaténaire. Des anticorps contre l’EMCV ont été détectés chez l’homme, sans qu’aucun lien ne soit établi entre le virus et une maladie cardiaque pour l’être humain.
Spécialiste des rétrovirus et oncovirus
Le scientifique revient en France à l’Institut Curie, après de différents voyages dans la seconde partie des années soixante. Il ouït la découverte à un certain nombre de cellules cancéreuses, modifiées ou non, par des virus oncogènes à ARN ou à ADN. Dans ses travaux, il essayait de trouver un ARN double brin spécifique du virus du sarcome de Rous (RSV), capable d’infecter et de transformer des cellules d’embryon de poulet. Il réussit à isoler des séquences d’ARN double brin, mais « elles étaient d’origine cellulaire et existaient au même niveau dans les cellules non infectées ». En relation étroite avec Louise Harel, la démonstration que cet ARN provenait en partie de séquences répétitives d’ADN est faite.
De nombreux travaux se sont soldés par des échecs, pour autant il persiste. Sur une décennie, à partir de l’année 1972 il s’entoure des meilleurs dans leurs domaines, Edward et Jacqueline De Maeyer, Jean-Claude Chermann et Françoise Barré-Sinoussi. Ainsi, il multiplie les recherches, comme les chances de percer les mystères de l’expression des rétrovirus. En 1980, une séquence d’ADN proche de celle du virus de la tumeur mammaire de la souris (mouse mammary tumor virus, MMTV) est détectée chez l’être humain, à travers deux patientes. Non seulement dans les cellules d’un cancer du sein inflammatoire, mais aussi dans ses lymphocytes T en culture.
La découverte du VIH
Son implication dans la course contre le virus du SIDA commençait en 1982. Un agent transmissible pourrait être à l’origine de cette nouvelle maladie mystérieuse. Il n’existait que quelques cas en France, mais suscitaient l’intérêt d’un groupe de jeunes cliniciens et immunologistes. Françoise Brun-Vézinet, contacta le professeur pour organiser la recherche du rétrovirus putatif à partir d’un patient présentant un signe précoce de la maladie, une lymphodénopathie. Avec Françoise Barré-Sinoussi et Jean-Claude Chermann, il met au jour un autre rétrovirus, qu’il baptise provisoirement LAV (Lymphadenopathy Associated Virus), depuis un prélèvement effectué par le Dr Willy Rozenbaum sur un jeune malade, ayant séjourné à New York.
La biopsie ganglionnaire est arrivée le 3 janvier 1983, il dissociait les lymphocytes, puis débutait leur stimulation en culture. Ce n’est quand septembre, qu’une présentation synthétique des données affichait un lien de causalité entre le virus et la maladie. Une deuxième famille de rétrovirus, les lentirétrovirus, venait de naître aux yeux des participants. Chez l’homme, il provoque une déficience immunitaire, n’ayant pas son équivalent parmi les animaux.
Histoire de royalties
Le 23 avril 1984, Margaret Heckler, secrétaire d’État américaine à la Santé, annonçait que Robert Gallo avait découvert la cause « probable » du sida, un rétrovirus baptisé HTLV-III. Il s’avérait être rigoureusement identique au LAV trouvé plus tôt par l’équipe de Montagnier. La polémique enfle à savoir qui est celui l’ayant identifié véritablement en premier. La réponse est primordiale, car elle règle la question des royalties liées aux tests de dépistage. Trois années de différend aboutissent à un consensus diplomatique en 1987. États-Unis et France officialisent la qualité de « codécouvreurs » pour Gallo et Montagnier.
Sans épilogue, une œuvre ne se termine pas. Ainsi, 20 ans après, avec l’attribution du Nobel pour la découverte du VIH, non pas à Gallo, mais à Luc Montagnier et à son associée Françoise Barré-Sinoussi. « On n’a pas réussi à éradiquer l’épidémie ou même l’infection puisqu’on ne sait pas guérir quelqu’un qui est infecté », expliquait à l’Agence France-Presse lors du 30e anniversaire de la découverte. Depuis, les médicaments antirétroviraux permettent en effet de museler efficacement le VIH, mais pas de l’éliminer totalement du corps des personnes infectées. Plus de 36, 3 millions de femmes, enfants et hommes sont morts des conséquences du SIDA…
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